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RESTAURATION DU CHÂTEAU DES ROURE À LABASTIDE DE VIRAC

Quand un château fortement abimé par l'Histoire retrouve au XXIe siècle son architecture du XVe siècle.

Le château des ROURE de LABASTIDE de VIRAC est ancré dans l’histoire mouvementée de l’Ardèche méridionale depuis plus d’un millénaire. D’abord propriété de moines bénédictins, cette forteresse féodale perchée sur un piton rocheux ne résistera pas aux violences du Moyen-âge. Elle connaîtra une résurrection improbable au début du XVème siècle. Un nouveau château a donc été érigé sur les ruines de l’ancien. C’est lui que nous visitons aujourd’hui. Mais entre-temps il aura été une nouvelle fois le témoin et la victime des fulgurances de l’Histoire.

Adhérant dès la Réforme au protestantisme, la population de la région s'est heurtée à l’intransigeance du pouvoir royal. Ainsi, en 1629, Louis XIII et Richelieu ordonnent sa destruction. L’essentiel sera miraculeusement épargné. Seules les parties défensives seront concernées. Et puis, en 1825, une nouvelle page de son incroyable destin se tourne. Son propriétaire, le comte du Roure, le vend à ses métayers, la famille Pradier.

Dès lors, ce château, qui s’élevait orgueilleusement à la frontière du Languedoc et du Vivarais, qui commandait le passage des gorges de l’Ardèche et qui s’imposait sur l’axe Privas-Nîmes, allait devenir pendant des décennies une simple ferme. Il faudra attendre la fin du XXème siècle, 1975 précisément, pour que l’idée audacieuse des propriétaires du moment, les descendants de la famille Pradier, bouleverse une nouvelle fois son destin. Ginette et Michel, un couple perspicace aux idées prémonitoires, se rêvent en véritables démiurges. Elle est institutrice, il est de formation boulanger, puis agriculteur. Ils décident de restituer son authenticité à leur château. Avec le soutien de l’association des "Amis du Château”, ils veulent le réinventer. Lui permettre de retrouver sa superbe. Ils pourront alors le faire visiter, l’ouvrir au public, le laisser se raconter. Rien a priori ne prédisposait ce couple de campagnards à se lancer dans une pareille aventure. Le projet semblait démesuré.

Après avoir débarrassé cette forteresse de ses oripeaux accumulés pendant des siècles, les stigmates de son histoire apparaissaient alors comme des plaies insupportables. Et même si la bâtisse est intrinsèquement saine, ses tours mutilées, ses remparts rasés par les injonctions royales, comme son donjon et ses mâchicoulis, allaient nécessiter une incroyable réhabilitation.
Le chantier s’étalera sur plusieurs décennies. Il impliquera essentiellement les artisans locaux et de petites entreprises. Celles et ceux du village et des communes voisines. Les pierres indispensables pour panser les manques et combler les failles viendront de la carrière toute proche de Barjac. Son succès sera la résultante de cette implication régionale. Son coût sera assuré grâce à un montage financier impliquant les propriétaires, l’aide de la Drac (ministère de la culture) et le soutien du conseil départemental de l’Ardèche.

Chaque artisan s’investira comme on s’engage dans une aventure personnelle. Menuisiers, ferronniers, charpentiers, maçons tailleurs de pierre vont rapidement se passionner pour le château. Ils le considéreront rapidement comme leur château, à l’image de ceux qui l’avaient édifié. Nombreux parmi eux révéleront même une véritable vocation dans la spécificité de leur mission. Ainsi, grâce au sérieux et à la qualité des travaux effectués, après avoir été classé dès 1978, le château se voit accorder une autorisation exceptionnelle par l’inspecteur des monuments historiques : le droit de remonter ses tours féodales. Dès lors, le château des Roure allait retrouver toute la magnificence de sa présence séculaire. Les tours et le toit refaits à l'identique enlacent de nouveau le donjon qui domine une région qui ne se résignait pas à sa disparition.

L’intérieur de la bâtisse sera traité avec le même soin. Les salles allaient être réaménagées. Elles seront même habitées par des mannequins habillés et mis en scène par la costumière Laurence Magnanelli. Pénétrer dans l’une d’entre elles s’apparente désormais à basculer dans l’intimité de la vie durant les siècles passés.

Jean-Louis Lascombe, son propriétaire, qui aime les défis et qui a le sens du spectacle a reconstitué à l’extérieur une des scènes déterminantes dans l’attaque d’une forteresse. Il a tout simplement érigé un trébuchet aux pieds des remparts. Le plus grand au monde (21 m). Chaque après-midi, pendant tout l’été, ce redoutable engin est en démonstration, capable de projeter sa charge à plus d’un kilomètre, s'il n'était pas bridé pour des raisons de sécurité.
Des 600 visiteurs de l’année 1975 guidés par Louis, à l'époque le doyen de la famille, ce sont désormais plus de 40 000 passionnés ou curieux qui découvrent chaque année ce joyau du moyen-âge.

Un staff d’une dizaine de personnes est nécessaire pour gérer et accompagner ce succès à l’image d’Emilie, une des filles du propriétaire, qui a suivi les cours d’une école de commerce pour mieux superviser le devenir de l’entreprise.
Ainsi, de la simplicité sacerdotale des moines bénédictins du XIème siècle, le Château des Roure de Labastide invite désormais à revisiter à travers les siècles son destin tumultueux qui est aussi celui de toute une région et des différentes époques qui ont marqué l’Histoire de France.

Jean-Marie Bayle

 

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