Statue d'Olivier de Serres à Villeneuve-de-Berg (bronze de Hébert, 1858)

OLIVIER DE SERRES, PÈRE DE L’AGRONOMIE

400ème anniversaire de la mort d'Olivier de Serres


La famille vivaroise Serres est à l’origine commerçante. Jacques de Serres (1516-1546) est marchand de draps &tissus à Villeneuve-de-Berg, Premier Consul de sa cité, Administrateur-Recteur de l'Hôpital. Il épouse le 1er juin 1532 Louise de Leiris, fille d'un notaire de Bourg-Saint-Andéol. Ils ont 5 enfants : deux filles, Claude et Delphine, puis trois garçons, Olivier en 1539, Jean et Raymond. La famille est protestante. Jean sera pasteur puis historiographe d'Henri IV, Olivier sera diacre de l'église réformée de Villeneuve-de-Berg.

Olivier de Serres n'a que sept ans à la mort de son père. La position de sa famille lui permet de bénéficier des meilleurs enseignements et d’un précepteur privé. Il étudie le grec et le latin, à Valence. Il complète sa formation par de nombreux voyages en France, Italie, Allemagne et Suisse ce qui lui permettra de donner des exemples toujours précis et variés. En 1557, Olivier de Serres acquiert les moulins du Pradel à un propriétaire désargenté qui lui cède pour 3 828 livres le reste de la propriété, soit une centaine d'hectares et une maison fortifiée, l'année suivante.

À 19 ans, Olivier de Serres porte les armes suivantes : « D'argent au chevron d'azur, chargé de trois étoiles d'or, accompagné de trois trèfles de sinople ».

Devenu "seigneur du Pradel" il y rajoute une couronne de marquis supporté par deux aigles. Olivier des Serres épouse le 11 juin 1559 à Villeneuve-de-Berg Marguerite d’Arcons (1540-1617), fille du juge de Villeneuve-de-Berg. Ils auront 7 enfants : Daniel, Gédéon, Charles, Bonne, Isabeau, Pierre, Jean et Marie. La famille Serres est mêlée de près aux guerres entre catholiques et réformés.

Olivier de Serres (1539-1619) est considéré comme le père de l’agronomie française. C’est en 1600, à l’âge de 61 ans, après 42 années de pratique agricole, qu’il publie son ouvrage de référence : Le Théâtre d’agriculture et mesnage des champs. Outre ses compétences d’agronome, d’ingénieur et de gestionnaire, il y démontre ses qualités d’écrivain, de poète et de philosophe, qualités qui rendent son ouvrage toujours passionnant.

"Le fondement de l'agriculture est la connaissance du naturel des terroirs que nous voulons cultiver"

Le livre est divisé en huit ‘lieux’ où sont analysées les différentes activités agronomiques, depuis la description et l’organisation du domaine jusqu’à la dépense des biens par le propriétaire :
1. Du devoir du mesnager
2. Du labourage des terres
3. De la culture de la vigne
4. Du bétail à quatre pieds
5. De la conduite du poulailler
6. Du jardinage
7. De l'eau et du bois
8. De l'usage des aliments

Le seigneur du Pradel s’inspire de son expérience personnelle de l’agriculture et de la gestion de son domaine ainsi que des auteurs anciens, qu’il cite souvent. Olivier de Serres fait paraître en 1599 La cueillete de la soye par la nourriture des Vers qui la font, texte sur la soie, préfiguration d’un chapitre du Théâtre d’Agriculture qui explique les moyens de fabriquer la soie dans le royaume de France et développer la production de la soie à grande échelle, via le développement de plantations de mûriers dont les vers à soie se nourrissent. Cet écrit fait référence, il est traduit en anglais et allemand. En 1602, une ordonnance royale impose à chaque paroisse de posséder une pépinière de mûriers et une magnanerie. Le Théâtre d’agriculture et mesnage des champs connaît à son tour un rapide succès, avec 25 éditions différentes en français entre 1600 et 2001 à Paris, Rouen, Genève, et pour la période récente : chez Dardelet à Grenoble, illustré par l’ardéchois Jean Chièze, en 1973, enfin chez Actes Sud en 1997 et 2001.

Olivier de Serres est également précurseur en matière de viticulture et d'oenologie. Il préconise la réalisation de fosses pédologiques permettant d’évaluer le potentiel agronomique des différents terroirs, de façon à y planter des cépages adaptés. Il préconise la plantation en ligne et en carré, qui permet l'utilisation de la traction animale, décrit le greffage, les vendanges sélectives, insiste sur l'hygiène et la qualité du travail de vinification en cave, la durée de cuvaison différente pour les vins blancs ou rouges, proscrit l’acidification du vin par ajout de sulfate de calcium, enfin préconise la distillation des vins de mauvaise qualité pour en faire du vinaigre.

Olivier de Serres meurt le 2 juillet 1619 (à l’âge de 80 ans) à Villeneuve-de-Berg.

par Bernard Champanhet

 

Pour aller plus loin :

Vidéos :
• https://youtu.be/XQrNR79pK34
https://www.youtube.com/watch?v=6vjmZlhnqYY

Bibliographie :
• Olivier de Serres : Théâtre d'Agriculture et mesnage des champs, Actes Sud, 2001.
• Olivier de Serres : Le Livre de raison, Presses Universitaires de Grenoble, 2004.
• Abbé Jean Charay : Olivier de Serres, Aubier, Paris, 1968.
• Fernand Lequenne : Olivier de Serres, agronome &soldat de Dieu, Berger-Levrault, Paris, mars 1983, 202 p.
• Jean Boulaine et Jean-Paul Legros : D'Olivier de Serres à René Dumont. Portraits d'agronomes, TEC &DOC Lavoisier, 1998.
• Henri Gourdin : Olivier de Serres, sciences, expérience, diligence, en agriculture au temps de Henri IV, Actes Sud, Arles, 2001.
• Jean Boulaine et Richard Moreau : Olivier de Serres et l’Évolution de l’agriculture, Éditions L’Harmattan, coll. « Les Acteurs de la Science », Paris, 2002.
• Lambert Caryl &Joseph Tom : Monsieur du Pradel, Olivier de Serres, Le Fond des choses, 2003.
• Dominique Margnat : Le livre de raison d'Olivier de Serres, PUG, coll. « La Pierre &l’écrit », nov. 2013.
• Marie-Hélène Reynaud : Olivier de Serres, un Vivarois père de l’agronomie moderne, Bulletin des Amis du Fonds Vivarois n°89, janvier 2019.

Galerie de photos

Le Théâtre d'Agriculture, Saugrain, 1608 Armoiries de Serres