Pirates Ardéchois 01

Des pirates Ardéchois dans l'Océan Indien ?

Au large de la côte Est de Madagascar, face à l’île Maurice et La Réunion, la petite île de Sainte-Marie (Nosy Bohara) est un joyau tropical bien gardé. Contrairement à Nosy Be et ses resorts « all-inclusive », Sainte-Marie s’est préservée du tourisme de masse et jouit d’un mode de vie décontracté, au rythme des alizées et du passage saisonnier des baleines au large.

Au XVIIe et XVIIIe siècle, l’île était tout sauf assoupie. Idéalement située sur la route des Indes, offrant eau douce, vivres et baies protégées des cyclones, Sainte-Marie était un repaire de pirates anglais et français. De forbans plutôt, c’est-à-dire ces authentiques pirates qui ne prêtaient aucune allégeance et « travaillaient » à leur compte. Un petit fort fut construit, et des dizaines de navires amarrés. Ils ne laissaient que peu de chance aux galions espagnols alourdis de richesses qui passaient au loin.

Au plus fort de son occupation en 1700, Sainte-Marie accueillait près de mille pirates. Des fouilles archéologiques (2022-2026) cherchent à éclairer cette période. Mais il est déjà possible aujourd’hui de visiter certains vestiges, comme le fameux « cimetière de pirates ». Une tombe en particulier, taillée dans le corail, retient notre attention. Sous le soleil tropical et les arbres du voyageur, il est possible de lire très distinctement :

CI GIT

JEAN LOUIS CHAUSSADENT NÉ A VESSAUX LE 11 OCTOBRE 1801

DÉPARTEMENT DE L’ARDÈCHE

MORT LE 8 SEPTEMBRE 1833 A FENERIF

PASSANT PRIE POUR LUI

Il y a cependant peu de chances que notre lointain confrère ardéchois, Jean Louis Chaussadent, ait été lui-même forban. Nos talents indiscutables de marins (d’Issarlès ?) ne sont pas en cause : la piraterie disparut simplement en 1730. Sainte-Marie fut prise et occupée par les Français en 1750 puis devient une colonie rattachée à Mayotte à partir de 1820.

L’île fut donc la plus ancienne implantation française à Madagascar, jusqu’à l’indépendance du pays en 1960. En 1833 cependant, la grande île de Madagascar n’est pas encore une colonie française. La reine Ranavalona 1ère règne et repousse les émissaires chrétiens européens pour préserver son royaume Merina de leur influence. Des expéditions sont lancées par les Français depuis Sainte-Marie vers la grande île, dont la ville de Fénérif (Fenoarivo Atsinanana). Jean Louis Chaussadent était donc un soldat du Roi à sa mort (Louis-Philippe règne alors), en septembre 1833.

Si nous nous penchons sur les archives du département de l’Ardèche (heureusement disponibles en ligne pour nous, Parisiens d’adoption), il est possible de constater qu’un certain Jean-Louis Chauchadent (Chaussadent) est bien né à Vesseaux, le 20 frimaire an 10 (11 décembre 1801).

La tombe située sur l’île Sainte-Marie, à 8000 km de Vesseaux, est authentique, bien que ses compatriotes (ou lui-même ?) se trompèrent de mois entre le calendrier républicain et grégorien. Aujourd’hui, les Chaussadent sont nombreux en Ardèche. Si vous en croisez un(e), dites-lui qu’un de ses lointain ancêtres repose sous les palmiers de Madagascar ?

Étienne STHÈME DE JUBÉCOURT

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